Le départ massif des intellectuels vers d’autres cieux à la recherche d’un mieux vivre, puise sa justification dans la gestion du pouvoir. Les dirigeants africains redoutent dans le fond ceux qui peuvent éclairer l’opinion. S’appuyant sur les réalités de l’époque, Ambroise Kom avait prédit l’exode massif aujourd’hui constaté
En 1993, il y a 31, le Professeur Ambroise Kom, enseignant des universités dans le monde, à l’époque enseignant de littérature négro africaine à l’université de Yaoundé, commentait un article pour tirer la sonnette d’alarme sur le phénomène de l’exil des intellectuels camerounais. Il décrivait déjà la situation qui prévalait à l’époque. Au Cameroun, dit-il, l’on s’était habitué jusqu’en 1982 à considérer comme normal l’exil politique des intellectuels militants. Ahidjo était passé dans l’histoire post-coloniale comme un dictateur qui n’a jamais hésité à fabriquer des procès contre les adversaires de son régime et à les passer par les armes sans coup férir. Toute personne qui franchissait les frontières du Cameroun savait à quoi s’attendre et se conduisait en conséquence. Ainsi aurait-il été suicidaire pour un Mongo Beti, un Moukoko Priso ou un Siméon Kuissu de lorgner du côté de leur pays natal à l’époque d’Ahidjo. Lorsque Biya succède au premier président de la République du Cameroun en 1982, il place son régime sous le signe de la libéralisation et du renouveau démocratique. Tout le monde croit voir la fin des exclusions et de la répression aveugle. D’autant qu’au cours d’un congrès de son parti en 1985, Biya affirme « qu’il n’est plus nécessaire, pour exprimer ses opinions, de prendre le maquis, de vivre en exil ou de quitter sa famille » (Cameroon Tribune du 22 mars 1985). Qui plus est, Paul Biya publie, en 1987, Le Libéralisme communautaire, un livre-programme aux idées exceptionnellement généreuses. Même Machiavel serait tombé dans le piège et aurait pu croire qu’au Cameroun, c’était véritablement la « fin du maquis ».
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