La crise postélectorale suite à la proclamation des résultats de l’élection présidentielle d’octobre 2025 revêt un caractère particulier. Plus que l’obéissance à un mot d’ordre, c’est l’expression d’un mal être profond, moteur d’une énergie insaisissable. Il faudra la comprendre pour la combattre
De quel côté se trouve encore l’énergie au Cameroun ? se demande Jean Pierre Bekolo. Jusqu’ici, Paul Biya a remporté toutes les guerres qu’il a menées — contre ses adversaires, ses amis, et même ses propres enfants politiques. Il a d’abord vaincu son père spirituel, Ahmadou Ahidjo, ce « Dieu du Nord » qui l’avait mis au pouvoir — puisqu’on dit que c’est Dieu qui l’a mis au pouvoir. Il a fini par le condamner à mort par contumace dans un procès, pour atteinte à la sûreté de l’Etat. Il était accusé d’être le cerveau du coup d’Etat du 6 avril 1984, dont l’issue a été l’extermination de centaines de compatriotes ayant une proximité communautaire avec l’illustre prédécesseur, devenu à l’occasion le sinistre prédécesseur. Puis vinrent les guerres contre ses compagnons de route : Ayissi Mvodo, Samuel Eboua… tous balayés. Il a vaincu ses « petits frères » comme Titus Edzoa, il a dévoré ses propres enfants politiques : Polycarpe Abah Abah, Jean Marie Atangana Mebara, Marafa Hamidou Yaya, Urbain Olanguena Awono, Edgard Alain Mebe Ngo’o — tous ces fidèles jadis puissants, réduits au silence. Tels des agneaux, ils se sont laissés conduire à l’abattoir, parfois même avec leurs épouses, comme Mebe Ngo’o, sans un cri. Pendant ce temps, le peuple camerounais, hypnotisé par les images de ces arrestations retransmises à la télévision nationale, applaudissait ces victoires. Il se nourrissait de la chute des puissants comme d’un spectacle, oubliant que ces triomphes n’amélioraient en rien leurs vies. On a même fini par célébrer, avec Paul Biya, l’entrée à l’initiative Pays pauvre très endetté (Ppte), le club sélect des pays affamés et sinistrés.
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